
Il y a plus de trente ans déjà, en 1984, Hervé Vilard se faisait plaisir avec l'album « les chansons que j'aime », florilège de tubes des années 60 et 70 créés par des chanteurs de sa génération (Clerc, Delpech, Fugain, Lama, Sardou, Polnareff, Clo-Clo, Johnny...). Huit ans plus tard, sur la scène du Théâtre des Variétés, il reprenait deux titres cultes du répertoire rive gauche (L'Écharpe de Fanon et Le Clown d'Esposito). Ce « coming out » musical verra son aboutissement en 2004 avec le spectacle (et l'album) « Cri du cœur », dans lequel le créateur de Capri c'est fini se muait en interprète convaincant de textes signés Bernard Dimey, Marguerite Duras, Jean Genet, Pablo Neruda, Brecht, Ionesco, Aragon et Prévert, sans oublier les Québécois Raymond Lévesque et Claude Léveillée. Et plus tard Allain Leprest. Hervé Vilard dans JE CHANTE, qui l'eût cru !
Votre disque « Cri du cœur » est sorti en 2004. Pourquoi avoir attendu si longtemps pour révéler votre passion pour la chanson à texte et la chanson d’auteur ?
J’attendais d’avoir des cheveux blancs... C’est ce que me conseillaient mes producteurs autrefois, parce que j’ai toujours voulu chanter Aragon et tous ces auteurs. Sur scène, je glissais toujours une chanson de Barbara ou de Ferré, mais on me disait systématiquement : « Mais avec la gueule que tu as, tu ne peux pas chanter ça ! » Si Capri n’avait pas été un grand succès, on ne m’aurait pas dirigé sur cette route-là. Au départ, ce n'était pas du tout ce que je voulais chanter. Quand j’ai écrit Capri, c’est fini – avant tout pour faire plaisir à Daniel Cordier, mon tuteur –, je croyais avoir écrit Ne me quitte pas !
À cette époque, j’étais disquaire chez Sinfonia, sur les Champs-Élysées, et je connaissais évidemment tout le répertoire. J’ai commencé par la musique classique et le jazz avant de passer à la variété. Ce que j’aimais, ce n’était pas du tout Frank Alamo ou Claude François. À part Dalida, j’aimais Barbara, Juliette Gréco – surtout Juliette Gréco –, Christine Sèvres et évidemment Mouloudji, Henri Tachan... Je ne vendais que ces artistes-là.
Les yéyés ne m’intéressaient pas. La maison de disques m’a proposé un compromis : ils proposaient deux chansons et moi deux autres chansons. Ils ont choisi Tout un dimanche avec toi qui est une véritable horreur, et que je n’ai d’ailleurs pas mis dans le coffret, et La vie sans toi. Moi, j’ai choisi Une voix qui t’appelle et Je veux chanter ce soir. Ensuite, il y a eu Capri et là, j’ai pris une autre route. Je ne pouvais pas refuser le succès. Salut les Copains m’a classé dans les yéyés et dès que je proposais un texte de Geneviève Dormann ou d'Henri Tachan, on me disait : « Écoutez, Hervé, avec votre petit minois, vous ne pouvez pas chanter ça. Attendez quelques années... »
La suite dans le nouveau numéro de JE CHANTE MAGAZINE : entretien de huit pages.