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Gilbert Bécaud à Sfax, Tunisie, en 1954


En 1954, quand, au tout nouveau théâtre de Sfax, la venue de Gilbert Bécaud fut annoncée, le jeune chanteur encore débutant était déjà précédé par sa réputation. Certains l’appelaient « Monsieur Dynamite », d’autres « le Champignon atomique », ou « Monsieur 100.000 volts. » En effet, nous savions que lors de son premier passage à l’Olympia des fauteuils avaient été cassés tant l’enthousiasme était à son comble ! Pourtant, il ne passait qu’en première partie, la vedette était alors Lucienne Delyle !

Aussi nous l’attendions tous avec une impatience frénétique et, en cours de recréation, l’on ne parlait que de cela. Il n’était pas question de rater son concert pour rien au monde. (Étant pensionnaire j’avais, bien sûr, prévu de faire le mur !)

Le grand soir arrive enfin, et nous sommes tous là. Mais également, parmi les notables, le surveillant général et le directeur du collège... mais ceci est une autre histoire !

Dès que le rideau rouge s’ouvre nous sommes déjà debout à applaudir comme des fous ! Déception, ce n’est pas lui, mais une première partie. Une chanteuse de couleur du nom de Dominique. Notre accueil est froid, et notre impatience à son comble !

Enfin, il apparaît dans son costume bleu nuit, sa cravate bleue à pois blancs. Les bras en croix, il attaque : Les croix. Ensuite, il se met au piano et tape sur les touches comme un forcené, il chante Quand tu danses, se lève du piano, passe d’un côté à l’autre de la scène à grandes enjambées, desserre sa cravate, rit de toutes ses dents, nous prend à partie, et, nous voilà dans l’ambiance de « Monsieur 100.000 volts » !

Nous crions, nous gesticulons... Le courant 100.000 volts passe très bien ! Suivent Méqué-Méqué, Donne-moi, Viens, C’était mon copain... Il se donne généreusement à la bande de cinglés que nous sommes, entre nos 15 à 20 ans ! Il bondit constamment micro en main, entre le piano et toute la longueur de la scène.

Ne pouvant casser les fauteuils... (nous sommes tous trop connus dans la petite ville de Sfax), nous espérons que lui, va casser le piano ! Il tape, il tape de toutes ses forces. Mais le Steiner résiste !

Le concert, hélas, se termine trop vite. On crie, on frappe des pieds des mains, il revient une fois, deux fois, trois fois. On continue à hurler, mais c’est fini, la fête est terminée.

Il ne reste plus qu’à aller le voir à la sortie du théâtre et, à l’accompagner jusqu’à l’Hôtel des Oliviers, puis prendre avec lui rendez-vous le lendemain afin de lui faire visiter la médina.

Roger Macchi

(Texte et photo)

• Article paru en avril 2011 dans JE CHANTE MAGAZINE n° 7 (spécial Bécaud).

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